Présidentielles et législatives : pour l’union de la gauche et des écologistes !
Pendant ces dernières années, sûrement en raison de mes « désobéissances » pour avoir fait le choix de l’union aux élections régionales successives, j’ai été politiquement astreint à un certain silence et ces dernières semaines encore, mon engagement public s’est limité à répondre aux sollicitations dont j’ai été l’objet pour accompagner la décision majoritaire des communistes de mener campagne en faveur de la candidature de Fabien Roussel au premier tour de l’élection présidentielle. Alors que mes camarades - ceux qui sont au Parti Communiste, ceux qui n’y sont plus, ceux qui n’y ont jamais été - n’ont cessé de se déchirer, par publications et messages interposés, j'ai souhaité, en m’engageant, me soustraire à cette agressivité mortifère, qui blesse et ne fait jamais progresser aucun débat. Tout en m’engageant dans la campagne de Fabien Roussel, j’ai dû aussi, sur les réseaux sociaux, me justifier et donner des assurances à quelques esprits sceptiques qui doutaient de la sincérité de mon engagement. Je voulais aussi être loyal vis-à-vis du Parti auquel j’apporte de manière substantielle des moyens dépassant de beaucoup la cotisation d’une simple adhésion ! Je dois cette honnêteté, cette fidélité et cette transparence aussi aux camarades, qui ont fait majoritairement le choix qu’ils ont cru juste, à un moment donné de présenter des candidat-e-s à toutes les élections. Pour certains, je sais que je n’en ai pas fait assez. Pour d’autres, c’était peut-être déjà trop ! Heureux sont celles et ceux qui ont, en ces jours troublés, tant de certitudes ! Pour ma part, je garde mes doutes mais, le temps étant peut-être enfin venu d’un peu plus de nuances, je me risque quand même à partager quelques réflexions.
Le résultat de Jean-Luc Mélenchon (21.95%, 7 714 949 voix) est remarquable. Faisant résonner une voix singulière dans cette campagne, il a certainement convaincu, au-delà de son socle habituel, des centaines de milliers, voire des millions de personnes de se rendre aux urnes, alors que nous était annoncée une abstention bien plus massive qu’elle ne l’a été finalement (26%). Le recul du vote blanc et nul, marqué en particulier dans les bureaux de vote les plus favorables à Jean-Luc Mélenchon, montre une mobilisation particulière et consciente de son électorat.
On a déjà maintes fois commenté le réflexe du « vote utile », en général pour amoindrir la portée du résultat de Jean-Luc Mélenchon. Cela m’inspire deux remarques.
1. Tout d’abord, si tant est qu’on accepte de faire sienne cette expression, ce n’est pas rien, pour l’analyse du mouvement des idées, qu’en l’espace de trois scrutins présidentiels, le vote utile à gauche soit passé du vote pour le candidat de la social-démocratie au vote pour un candidat et un programme qui portent une alternative de transformation sociale. Avoir déplacé le centre de gravité de la gauche plus à gauche, c’est indéniablement le mérite de Jean-Luc Mélenchon et des militants qui l’ont accompagné au cours de ses trois campagnes présidentielles (dont les communistes furent, deux fois sur trois !).
2. Celles et ceux qui pourfendent - depuis longtemps et à juste titre - les institutions de la 5e République ne peuvent pas ignorer que le réflexe du vote utile est le « retour de bâton » qui menace tout parti qui pense devoir présenter un candidat pour « exister » dans ce scrutin présidentiel, qui tend à polariser la vie politique et, de fait, laisse peu de place à la palette de nuances qui caractérise une « préférence » politique.
J’en viens à un autre point qui me fait mal, à la lecture des différents commentaires se rapportant aux résultats de premier tour. Ces échanges d’invectives entre militant-e-s de gauche qui s’accusent mutuellement d’être responsables de la non-qualification d’un candidat de gauche pour le second tour me blesse et me touchent au plus haut point.
Alors je me permets de de dire aux militant-e-s de la France Insoumise que je comprends leur amertume pour s’être sentis bien seuls et, au terme d’une très longue campagne, pour avoir manqué la marche de la qualification d’aussi près ! Mais je me permets quand même de les inviter un instant à apprécier l’importance du travail accompli.
Mais maintenant, pourquoi ne pas tendre la main à celles et ceux des électeurs de gauche, communistes, écologistes, socialistes, d’extrême-gauche, qui, en conscience, au cours des dernières semaines ou dans les ultimes heures avant le scrutin, ont choisi de porter leur voix sur Jean-Luc Mélenchon ?
Pourquoi ne pas dire à celles et ceux qui ont choisi de rester fidèles à leur candidat : nous vous comprenons aussi, car nous savons mieux que personne ce que signifie la fidélité à ses idées et quels choix difficiles il faut faire, parfois, pour les faire perdurer ? L’heure n’est-elle pas aussi à comprendre le dilemme cornélien de milliers de communistes qui ont finalement fait le choix du vote Mélenchon alors que leur intention première était le vote Fabien Roussel ?
Pour illustrer davantage mon propos, je fais le détour par une analyse plus locale et plus régionale du scrutin. En Bretagne, à Rennes et à Brest, la candidature de JL Mélenchon arrive en seconde position, devant le RN. A l’élection régionale, il y a moins de dix mois, c’est la liste de gauche qui l’a emporté.Qu’est-ce qui pourrait laisser penser, aujourd’hui, que ces sensibilités, qui avaient trouvé à s’exprimer, en 2021, dans le cadre d’un scrutin de listes, n’existent plus ? Je crois, au contraire, que reconnaître que ces sensibilités perdurent, c’est comprendre d’autant mieux l’aspiration profonde au rassemblement qui existe, parmi les électrices et les électeurs de gauche, qui ont trouvé la voie pour l’exprimer, après que les appareils politiques ont échoué à ouvrir ce chemin eux-mêmes.
Mais, pour être honnête, cette précision ne m’empêchera pas de dire que, pour le PCF, l’affaire m’apparait d'autant plus douloureuse que son électorat a massivement fait le choix du vote Mélenchon. N’imputons donc pas aux communistes la responsabilité de la non-qualification de Mélenchon pour le second tour ! Cette réalité, que nous devons mieux prendre en considération, ne devrait-elle pas prévaloir en vue de construction de candidatures unitaires pour les élections législatives ? J’imagine bien que certains camarades s’évertueront à me démontrer quelles différences nous séparent de Jean-Luc Mélenchon. Je me contenterais de répondre que ces différences ne m’éloignent de mon Parti. Ce qui fonde mon engagement reste plus que jamais vivace.
Je suis communiste parce que je pense que nous avons besoin de penser et d’affirmer une radicalité pour dépasser le capitalisme et faire advenir le temps des communs, parce que je crois que nous avons besoin d’une organisation politique pour structurer les luttes et éveiller des consciences et parce que je veux construire des rassemblements majoritaires qui permettent d’exercer les responsabilités et d’être utiles à celles et ceux que nous prétendons défendre.