Parlons cinéma... - Sénateur Gérard LAHELLEC

Parlons cinéma...

Parlons cinéma...

 

 

 

« Anatomie d’une chute » : Un juste retour des choses !


En remportant l’oscar du meilleur scénario original, le film de Justine Trillet confirme son parcours exceptionnel depuis sa palme d’or remportée à Cannes, en mai 2023. Il s’est hissé jusqu’à cette récompense sans en passer par la commission ad hoc désignée par le CNC ni la catégorie « meilleur film étranger ». Et puis un Oscar pour un film Français, cela n’était pas arrivé depuis 2011 !


Souvenons-nous, en recevant sa Palme d’or à Cannes, Justine Triet la dédia aux jeunes réalisateurs et fit l’éloge du mécanisme conçu en 1946 puis renforcé dans les années 1980 pour les encourager. En s'inquiétant de la « marchandisation de la culture soutenue par le gouvernement elle ne manqua pas de rappeler que sans l’exception culturelle Française elle n’en aurait pas été là ! Elle ne manqua pas de rappeler aussi sa ferme opposition à la réforme des retraites. Il n’en fallut pas plus pour déclencher une horde de critiques allant jusqu’à l’accuser d’un engagement idéologique d’extrême gauche alors qu’elle aurait dû être redevable des aides publiques ayant permis au film de voir le jour ! Ce petit chantage aux aides selon le mode « prends le fric et tais toi » devient bien dérisoire devant la consécration obtenue ce 11 mars 2024 à Los Angelès !

 

 

Proposition de loi visant à conforter la filière cinématographique

 

Ce texte constitue l’occasion de parler spécifiquement du cinéma pour la première fois depuis la loi du 30 septembre 2010 relative à l’équipement numérique des établissements de spectacles cinématographiques.

 

1. Parler du cinéma aujourd’hui, c’est d’abord rappeler que le cinéma français s’en sort mieux en 2023 que dans d’autres pays qui semblent ne pas se remettre des conséquences de la Covid. 

 

Nombreux sont les exemples éloquents dans ma circonscription pourtant à dominante rurale : 

  • Le cinéma Les Korrigans à Guingamp a vu ses entrées bondir de 20 %, 
  • À Lamballe le cinéma Le Penthièvre fait 2900 entrées en plus en 2023,
  • Le Quai des images connaît une hausse de 25% de sa fréquentation à Loudéac
  • Tandis que le festival Films Courts double son nombre de spectateurs à Dinan.

 

=> Il faut nous en féliciter !

 

 

2. Mais parler du cinéma aujourd’hui c’est aussi exercer une vigilance sur la production et les conditions de production cinématographiques.

 

Ne soyons pas sourds aux revendications qui se font entendre en faveur d’une plus juste rémunération des artistes-auteurs. Regardons à ce titre d’un bon œil le combat des acteurs hollywoodiens qui, après 118 jours de grève, ont obtenu un accord actant une augmentation de près de 8% des salaires minimums.

 

Améliorer les conditions de production, comme le contexte actuel semble nous le rappeler, c’est également faire en sorte que les femmes, actrices, réalisatrices, techniciennes puissent exercer leur métier sans crainte. Nous devons à ce titre combattre toute forme d’omerta et tout mettre en œuvre pour que le monde du cinéma ne soit pas une sphère susceptible de se dérober à l’action de la justice.

 

3. Enfin, parler du cinéma c’est rappeler notre attachement à l’exception culturelle, cette fameuse politique inspirée de Malraux qui consiste à soustraire de la loi marchande, les biens culturels.

 

Parce que participant de l’émancipation humaine, les œuvres cinématographiques ne sont pas des biens marchands comme les autres. Elles doivent à ce titre être accessibles à tous.

 

Ainsi, le financement redistributif du CNC permet de financer, via les ventes des billets de blockbusters, la création de « petits » réalisateurs avant qu’ils ne soient connus, attribue des aides aux « petits » producteurs, distributeurs ou exploitants dont la billetterie est faible. Ce système rend alors accessible la diversité de l’offre cinématographique à l’ensemble des salles de cinéma, jusqu’aux contrées les plus lointaines, construisant par-là toutes les conditions nécessaires à ce que les chefs d’œuvre du cinéma deviennent de grands films populaires !

 

Or cette exception culturelle semble aujourd’hui menacée. À l’instar de la voix de Justine Triet qui s’est élevée au festival de Cannes, il nous faut être attentifs à ceux dont le cœur penche toujours un peu plus vers la marchandisation du cinéma. Je pense en particulier à ceux qui plaident pour une plus large part de financement privé ou encore ceux qui voudraient plafonner l’ensemble des taxes affectées au CNC.

 

=> Face à ces remises en cause de l’exception culturelle, le texte dont il est question aujourd’hui entend apporter des éléments de protection :
- L'assouplissement du système d’agrément du CNC permettra d’assurer une juste rémunération des distributeurs et une équité d’accès pour les exploitants indépendants, favorisant ainsi la diversité culturelle.
- L’obligation pour les distributeurs de consacrer une diffusion minimale de l’offre cinématographique dans des lieux à faible densité démographique répondra à l’objectif de démocratisation de la culture.
- Enfin, une rémunération minimale des auteurs sera assurée par le conditionnement des aides du CNC au respect des accords de rémunération.

 

Favorable à ces avancées, j'ai voté en faveur de ce texte.